lundi 18 avril 2011

Lutte

C’était la première fois que je devais me débrouiller seule dans Jaipur, partir de la PG House et arriver à l’arrêt de bus non loin. Excellente occasion de prendre pied dans la ville, de réapprendre à se battre avec les rickshaws, les stations de bus labyrinthe et les gens qui regardent.

Pour l’aller, pleine de bon sens, je me suis dit : demandons au propriétaire, il va bien arrêter un rickshaw et négocier pour moi, ce sera plus simple. Mais voilà, si l’on demande à un Indien de nous aider, il laissera passer dix minutes avant de trouver un rickshaw-vélo (les auto- sont trop chers et pas fiables) et encore cinq bonnes minutes avant de trouver celui qui accepte son prix : 20 roupies au lieu de 50 avec un auto-rickshaw. Ca ne vous dira rien, c’est ridicule en euro mais c’est une grosse différence en roupie pour un voyage en rickshaw.

Arrivée sans heurts et tracas à l’arrêt de bus, je me rends compte que c’est immense et que je n’ai aucun moyen de trouver le bus pour Ajmer en regardant autour de moi. J’avance, j’avance, je dépasse la première plate-forme, j’arrive à la deuxième, quelqu’un me dit d’aller « par là » (je comprends le signe plus que les mots), je me dirige « par là », il y a du bruit, des bus et des gens partout, des hommes en grande majorité. Je me sens perdue. J’avise une femme assise, un homme vient aussitôt. Je lui fais non de la tête : je ne veux m’adresser qu’aux femmes. Manque de pot, c’était son mari – j’aurais dû m’en douter. Je repose ma question (qui se résume à : où est le bus pour Ajmer ? en mauvais Hindi), elle me fait signe que le bus en train de partir est celui pour Ajmer, juste à côté. Soulagée, je me précipite dedans (non sans avoir vérifié auprès du conducteur). Mes oreilles non habituées à tous ces bruits de station de bus ne peuvent percevoir qu’entre tous les cris, le cri « Adjmééééér ! » provenant de ce bus indique clairement la direction. Dans chaque bus, une personne crie la direction avec un accent et un ton particuliers, c’est très rapidement une cacophonie dans laquelle mes oreilles ne distinguent plus rien ; sans parler des pots d’échappement que les conducteurs font vrombir pour bien faire comprendre que le bus est en train de partir. Et mes yeux tentant de déchiffrer les directions indiquées sur les bus ne peuvent lire Ajmer sur celui-là, ce qui tend à prouver qu’il ne faut pas s’y fier tant que ça.

J’étais tellement soulagée d’avoir trouvé un bus que je n’ai pas pris garde à son état : j’étais malheureusement tombée sur un bus plutôt mauvais et inconfortable. Au moins n’avais-je pas de voisin, pas de smartphone avec de la musique populaire, et suis-je bien arrivée à destination – ce dernier point étant essentiellement la raison pour laquelle on prend un bus.

Le retour fut sans grand intérêt (et plus confortable) pour la partie bus, la partie rickshaw étant plus digne d’une narration détaillée :

Forte des conseils de mes propriétaires, j’ignore avec quelque hauteur les premiers auto-rickshaw-walle qui se précipitent à la sortie du bus et focalisent exclusivement leur attention sur l’occidentale qui en sort ; je me dirige donc à pas pressés vers la sortie et vers les vélo-rickshaws. Je suis bien vite entourée d’un nuage de conducteurs des deux types de rickshaw, essayant d’attirer mon attention : c’est le problème des gares, ils tiennent un cartel et savent ce qu’être occidental veut dire. Un type à qui je demande me dirige vers un autre, je lui demande son prix (avec le nuage de richshaw-walle autour), il me dit qu’on verra, j’insiste, il m’en propose le double, je lui dis que j’habite là-bas, je lui en demande moins, il me fait signe de monter. Je cède.

Quelques centaines de mètres plus loin, on arrive dans le quartier ‘Bani Park’, le quartier où j’habite. Par chance, c’est déjà le bloc D, bloc dans lequel j’habite. Je m’étais bêtement dit que sachant D-38, et étant dans le bloc D, il serait aisé de retrouver la maison numéro 38 – j’avais sous-estimé à la fois l’échelle du bloc D et le désordre apparent de la disposition des maisons. Il s’arrête une première fois pour demander son chemin, le type avisé ne sait visiblement pas, ou ne comprend pas. Avec un flegme tout Indien, mon rickshaw-walla descend du rickshaw pour se rapprocher du type, et avec ce même flegme, le type se déplace et en hèle un autre ; il y a rapidement un attroupement de quatre, cinq personnes qui essaient de comprendre l’adresse et réfléchissent, réfléchissent, ne savent pas mais ont tous l’air très absorbé.

C’est gentil, me dira-t-on. Oui, c’est très gentil, mais la scène se reproduisant deux, trois, quatre fois (tous les dix mètres environ), je finis par perdre patience et lui dire d’avancer parce que 1- visiblement, les types à qui il demande ne savent pas plus que lui, 2- je dois aller au travail et poser mes bagages dans ma chambre auparavant, 3- il suffit de regarder les numéros sur les maisons (que je pensais, à ce moment-là). Il continue de mauvaise grâce et quelques centaines de mètres plus loin … Nous arrivons au bloc E. Je le lui fais remarquer, il me répond – avec justesse – que dans ce cas j’aurais mieux fait de le laisser demander son chemin. On continue, reprenant le rythme dix mètres/on demande. Les minutes passent, passent ... Après deux vendeurs de petits trucs, deux barbiers et trois passants, il demande enfin à un autre rickshaw-walla et, pendant leur dialogue animé, entre deux gros soupirs, je finis par avoir un éclair de génie : il se peut que j’aie l’adresse dans mon sac, et qu’il y ait une autre indication. Je sors la feuille et, n’en menant pas large, je donne le nom de la rue ; l’autre rickshaw-walla lui explique, enfin, comment accéder à ce lieu qui me parait soudain, de lointain et irréel au milieu de ce labyrinthe immense, un endroit concret, tout prêt, atteignable. Nous nous empressons de continuer la route, j’ai bien évidemment – l’aurais-je mérité ? – droit à des remarques moqueuses de la part de mon rickshaw-walla : « - Vous auriez pu me le dire avant ! - Mais je ne savais pas, avant … » (toujours en Hindi). Il insiste, quelques centaines de mètres plus tard : « quand-même, si vous me l’aviez dit avant … », et, m’imitant, « allez, bhaya, allez ! ». Dans un demi-sourire, l’air un peu énervé : « Arrre… sorry bhaya, sorry ». Il rit. Arrivés à destination, et avec cette emphase propre à l’humour Indien, il me dit que je lui ai fait parcourir tout Jaipur à pied. Comme mon pauvre Hindi est suffisant pour un peu d’humour, je lui réponds qu’il a seulement parcouru tout Bani Park. J’ajoute que désormais, il connait très bien le quartier. On se quitte sur ces mots, lui assuré d’avoir une histoire hilarante à raconter aujourd’hui, moi épuisée par cette lutte mais riant malgré tout.

A Delhi, les blocks sont mieux organisés et je n’ai jamais eu à donner le nom de la rue (que je ne connaissais pas, de toute manière) à un rickshaw – même ignorant du lieu – pour qu’il en trouve l’emplacement en demandant au gardien du coin.

A Delhi, les rickshaws ont franchement moins le sens de l’humour.

A Delhi aussi, c’est tout un apprentissage par bonnes et moins bonnes expériences pour se faire une place, ici.

2 commentaires:

  1. Haha! Le côté "tête de linotte" de notre chère indienne est très bien rendu! Pour l'anecdote humoristique c'est tout bon ; et pour lui et pour toi. Merci et porte toi bien. Des bisous.

    RépondreSupprimer
  2. Je suis ici pour partager mon témoignage de ce qu'une bonne société de prêt de confiance a fait pour moi. Je m'appelle Nikita Tanya, je suis russe et je suis une charmante mère de 3 enfants.J'ai perdu mes fonds en essayant d'obtenir un prêt, c'était si difficile pour moi et mes enfants, je suis allé en ligne pour demander une aide au prêt, tout l'espoir était perdu jusqu'au jour fatidique où j'ai rencontré cet ami à moi qui a récemment obtenu un prêt d'un homme très honnête, M. Benjamin. Elle m'a présenté cet honnête agent de crédit M., Benjamin qui m'a aidé à obtenir un prêt dans les 5 jours ouvrables, je serai à jamais reconnaissant à M. Benjamin, de m'avoir aidé à me remettre sur pied. Vous pouvez contacter M. Benjamin par e-mail: 247officedept@gmail.com ils ne savent pas que je fais ça pour eux, mais je dois juste le faire car il y a beaucoup de gens qui ont besoin d'une assistance de prêt, venez à cet honnête homme et vous pouvez également être sauvé .WhatsApp: (+ 1 989-394-3740)

    RépondreSupprimer